Marie-Louise-Charlotte-Philippine Pairie, fille soumise et patentée par la police.

Cette allégorie caricaturale de la pairie présente une vieille femme bouffie, au nez d'ivrogne, affalée dans un fauteuil, une croix de la Légion d'honneur autour du cou et coiffée d'un chapeau . Elle prend dans sa main droite une pièce de monnaie, d'autres sont ammassée dans les plis de sa robe ; de la main gauche elle verse d'autres pièces dans un sac marqué "NATIONA[L]". Derrière elle, à gauche, un autre sac porte l'inscription "NEY". En bas de sa robe, on peut lire successivement, de gauche à droite : "directoire", "Empire", "restauration", "JUSTE M[ilieu]". Cette caricature féroce de l'institution fait allusion au procès du "National" instruit par la Cour des Pairs. Dans un article du 10 décembre intitulé "De la Compétence de la Cour des Pairs" le journal d'opposition avait vivement critiqué cette dernière et dénoncé son incompétence à l'égard des prévenus d'Avril, insurgés amené à comparaître devant elle. L'auteur de l'article écrivait ainsi : "les vieux sénateurs de Bonaparte, ses maréchaux tarés, les procureurs-généraux, les ennoblis de la restauration, ses trois ou quatre générations de ministres tombés sous la haine et le mépris public et couverts de notre sang, tout cela rajeuni de quelques notabilités jetés là par la royauté du 7 août à la condition de n'y jamais parler que pour approuver ; tout cet ensemble de servilités d'origines si diverses n'est pas compétent à prononcer sur la culpabilité d'hommes accusés d'avoir voulu forcer les conséquences de la révolution de Juillet". Dans sa lithographie Daumier reprend, unifie par l'allégorie et charge encore davantage ce portrait de l'institution. La Cour des Pairs s'était, dès le lendemain, saisie de l'affaire et avait intenté un procès pour diffamation à Alphonse Rouen, gérant du "National", conduisant à sa condamnation à 10 000 francs d'amende et deux ans d'emprisonnement.Par ailleurs, le "National" dans son article, puis lors du procès, comme Daumier dans sa lithographie, n'avait pas manqué de rappeler la condamnation à mort du maréchal Ney en 1816 la Cour des Pairs, symbole de sa lâcheté et de son iniquité. Dans le dispositif allégorique de combat de la "Caricature" Marie-Louise-Charlotte-Philippine Pairie, incarnation d'une institution frappée de déchéance physique, intellectuelle et morale apparaît à l'opposé exact de Françoise Désirée Liberté, fille du peuple (voir "La Caricature", 3 mars 1831, Planche 36), incarnation de l'avenir de la Nation.